Qu'apporte de nouveau cette étude ?De tels résultats, observés au long cours chez la majorité des patients, n'avaient encore jamais été rapportés. Cette étude a également montré pour la première fois le rôle crucial de la fonction initiale des îlots sur leur survie à distance. En effet, tous les patients qui présentaient un équilibre glycémique optimal un mois après la greffe gardent aujourd'hui des îlots fonctionnels. Ces patients ont pourtant bénéficié d'un traitement anti-rejet classique. Nos travaux montrent que la thérapie cellulaire du diabète est efficace et que la fonction initiale des cellules greffées est l'un des éléments clés de son succès durable. Pour l'instant, cette nouvelle approche thérapeutique reste cependant réservée aux formes de diabète les plus instables pour lesquelles le pronostic vital est engagé, précisent François Pattou et Marie-Christine Vantyghem.
Quelles étaient les difficultés rencontrées jusqu'alors ?Grâce à l'utilisation de nouveaux traitements anti-rejet, les premiers succès ont permis au début des années 2000 de valider le principe de la greffe d'îlots chez les patients atteints de diabète de type 1 sévère. L'épuisement des îlots greffés semblait cependant inexorable chez la majorité des patients après la première année, aboutissant à la perte progressive du greffon. La cause la plus fréquemment évoquée pour expliquer ces résultats finalement décevants était la réaction immunitaire (rejet) du receveur contre les îlots transplantés et l'insuffisance des traitements anti-rejet.
Quels obstacles limitent encore la thérapie cellulaire du diabète ?La nécessité d'un puissant traitement antirejet reste un frein important. Ce traitement impose en effet une surveillance attentive pour détecter et traiter rapidement les complications infectieuses et tumorales (cutanées en particulier) favorisées par la diminution des défenses immunitaires. Pour l'instant, le bénéfice observé semble largement compenser les risques liés à la greffe. Seul le suivi au long cours d'un plus grand nombre de patients permettra cependant de répondre à cette question. C'est l'objet du registre international financé par le - National Institute of Health - américain (
www.citregistry.org) afin de colliger les résultats de 9 équipes réalisant ce type de greffe aux USA et dans trois centres européens (Lille, Genève, et Milan).
Le deuxième obstacle au développement à plus grande échelle de la greffe d'îlots est la faible disponibilité des pancréas humains issus des dons d'organes coordonnés par l'Agence de Biomédecine. Plusieurs travaux récents laissent cependant entrevoir la possibilité de produire au laboratoire de grandes quantités de cellules béta humaines, en particulier à partir de cellules souches embryonnaires.
Concrètement, quelles seront les suites de cette étude ?L'équipe lilloise conduit actuellement une étude similaire pour une autre catégorie de patients, chez lesquels le diabète a déjà détruit les reins et justifie une greffe rénale. Avec l'autorisation de l'Afssaps (l'organisme qui encadre en France la thérapie cellulaire), les chercheurs vont débuter en septembre un nouvel essai clinique qui testera un nouveau traitement susceptible d'améliorer l'implantation et la survie des îlots.
Une étude multicentrique est également prévue avec les autres équipes réalisant ce type de greffe en France (Besançon, Grenoble, Lyon, Montpellier et Strasbourg, en collaboration avec Genève) afin de comparer le rapport risques / bénéfice et le coût de la greffe d'îlots à ceux des traitements classiques. Si les résultats sont positifs, la greffe d'îlots pourrait alors devenir une alternative reconnue pour le traitement des formes les plus sévères du diabète.
Enfin, un consortium international associant 18 équipes, dont l'unité 859, vient d'obtenir le soutien de la Commission Européenne pour les 5 prochaines années afin de développer à plus grande échelle la thérapie cellulaire du diabète et envisager en particulier la greffe de cellules issues de cellules souches embryonnaires.
Qui a participé à cette étude ?L'unité 859 est une équipe de recherche multidisciplinaire de l'Inserm et de l'Université de Lille-Nord de France, composée de 17 personnes. Son objectif est le développement de nouvelles approches thérapeutiques du diabète basées sur les biothérapies. L'unité 859 est aussi une des trois équipes fondatrices d'EGID, un institut européen de recherche sur le diabète, créé cette année à Lille. Cette étude a été coordonnée par Francois Pattou (Chirurgien, greffe), Marie-Christine Vantyghem (Endocrinologue, évaluation et suivi des patients), Julie Kerr-Conte (Biologiste, préparation des îlots), et Christian Noel (Néphrologue, immunologie) et menée en étroite collaboration avec les équipes médicales et la Fédération de recherche clinique du CHU de Lille.
source : medicms